La Grande Epopée
Un conte musical Ă travers les continents
Nach Ximbal
Huri noa te whenua
ć性çćČè©©
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SĂĄpÊk a-paĂĄc
« Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas »
INTRO
Câest le rĂ©cit dâune des expĂ©dition les plus folles de lâhistoire, celle dans laquelle embarquĂšrent un groupe dâintrĂ©pides navigateurs et musiciens, partis Ă la dĂ©couverte des mille royaumes, bravant les Ă©lĂ©ments jusquâaux contrĂ©es les plus reculĂ©es de la Terre.
Voici leur histoire
Quand ils partirent du Port des Dames, les marins chantaient et les rĂȘves les hantaient dĂ©jĂ .
La traversĂ©e du Grand OcĂ©an, une poignĂ©e de tĂ©mĂ©raires lâavaient tentĂ© auparavant, mais nul nâen Ă©tait jamais revenu vivant. Toutes voiles sortis, le Passaro, la caravelle de cent pieds de longs conçue Ă lâĂ©preuve des mers les plus tumultueuses, commença son long voyage au delĂ de lâhorizon.
Le dĂ©but de la traversĂ©e se dĂ©roula sans encombre, on naviguait tranquillement avec lâĂ©toile polaire. Mais aprĂšs quelques jours, des nuages sombres et menaçants apparurent au loin. LâalizĂ© se lĂšve et la tempĂȘte gronde.
Enfin, la tempĂȘte passe. Jamais lâĂ©quipage nâen avait vĂ©cu de telle. Toutes les lĂ©gendes sur le Grand OcĂ©an leur semblaient alors de doux euphĂ©mismes. Mais le Passaro, robuste et agile, remuĂ© par les vents et par la houle, a tenu bon.
DerriÚre les derniers nuages, la vigie aperçoit enfin la terre ferme baignée dans une magnifique éclaircie.
AMERIQUE
Quand ils posĂšrent le pied sur le nouveau continent, lâair Ă©tait humide et la forĂȘt plus luxuriante et foisonnante que nul part ailleurs. Nos aventuriers sây engouffrĂšrent sans hĂ©siter puis ne tardĂšrent pas Ă rencontrer les premiers habitants des lieux.
Leur chef se présenta et leur dit : - *Chant
Auquel Tito, commandant du Passaro et grand astronome, leur répondit :
- Nous faisons partie de lâexpĂ©dition du bout du monde, prĂ©sentez-nous votre pays.
Ils tentĂšrent bien de communiquer mais leur langue et leur coutumes Ă©tait si diffĂ©rentes quâon nâarriva point Ă se faire comprendre. Alors un jeune de la tribu sâavança avec un objet aux tubes de diffĂ©rentes longueur dans les mains. Tous reculĂšrent, y voyant une sorte dâarme, sauf le musicien Allegro qui comprit tout de suite de quoi il sâagissait.
Le jeune leur tint Ă peu prĂšs ce langage : -
Auquel Allegro répondit : - *Musique
Le chef sortit ce qui ressemblait Ă une flute et ajouta : - *Musique
Et tous se joignirent Ă eux
*Musique
Et ainsi tous finirent par se comprendre.
En voyant son Ă©tonnement, le chef donna Ă Tito un sac rempli dâor et de pierres prĂ©cieuses et lui expliqua : leur voisin, le Royaume de la Montagne, fatiguĂ© dâassister Ă lâenvie et la violence que ce mĂ©tal engendrait, dĂ©cida de le confier aux habitants de la forĂȘt chez qui il nâavait aucune valeur. En effet, que pourrait-il apporter que la Nature ne leur fournit dĂ©jĂ ? Ce nâest pas lui qui fait pousser les plantes, couler les riviĂšres, voler les oiseaux ni chanter les hommes.
On le remercia mille fois et on nomma ce lieux en son honneur : le pays dorĂ©, lâEldorado. Non pour lâor en abondance dans le village, mais pour celui que ses habitants avaient dans leur coeur.
AprĂšs avoir fait le tour du continent tandis que ce moment rĂ©sonnait encore en eux, nos aventuriers remirent le cap vers lâOuest sur une mer que personne nâavait jamais encore naviguĂ©. La traversĂ©e avant dâatteindre de nouvelles terres fut aussi paisible que longue, et on nomma alors cette nouvelle mer du Sud lâOcĂ©an Pacifique.
POLYNESIE
Quand ils posĂšrent le pied sur lâune des innombrables Ăźle des environs, ils furent accueillis par tout un groupe de locaux. Ils Ă©taient tous nus de la tĂȘte aux pieds, mais semblaient ignorer quâils lâĂ©taient.
Tito demanda Ă voir leur chef mais ils nâen avait pas. Ce mot Ă©tait tout simplement absent de leur vocabulaire. En revanche ils avaient un vingtaine de façon de dĂ©signer lâeau.
Ils se nommaient eux mĂȘme les Iwi WaĂŻ, le Peuple de lâEau.
Ils ignoraient Ă©galement la guerre et la possession car ils nâavaient aucun pays Ă servir et que tout ici Ă©tait en abondance. On avait bien pourtant mis en garde nos voyageurs que lâhomme Ă©tait un loup pour lâhomme, « quâil Ă©tait plein de besoin, dâaviditĂ©, dâoppression, de dĂ©sir et dâorgueil ». Mais ils se rendirent compte quâon avait transportĂ© Ă lâĂ©tat de nature des idĂ©es prises dans la sociĂ©tĂ©.
Les Iwi WaĂŻ se contentaient de cueillir le jour et de chanter la vie.
Au moment du dĂ©part, certains dĂ©cidĂšrent de rester, tandis que le Passaro sâenvolĂąt de nouveau sur des flots inconnus.
CHINE
Le temps Ă©tait incertain et le brouillard sâĂ©tait installĂ©. Une silhouette de navire se rapprochant vers eux se distinguait Ă travers la brume Ă©paisse. Quand nos marins crurent que la bateau Ă©tranger Ă©tait Ă leur niveau, la silhouette continuait de grandir et de se rapprocher.
Sa proue fini enfin par sortir du brouillard. Ils avaient alors devant eux le navire le plus imposant quâils nâavaient jamais vu, avec ses neuf mats et ses quatre cents pieds de long.
Il fit signe de les suivre jusquâau port.
Quand la brume se dissipa, ils découvrirent le plus impressionnant des port abritant la plus grande de toute les flottes. Elle comptait selon les estimation dans les deux-cent cinquante navires.
Le Passaro que rien nâavait jamais Ă©galĂ© en taille faisait pĂąle figure ici. Nos marins pensĂšrent quâil venait de dĂ©barquer chez les gĂ©ants.
Mais quel fut leur Ă©tonnement lorsquâils dĂ©couvrirent que les habitants faisait la mĂȘme taille quâeux et que la ville Ă©tait en pleine fĂȘte !
On les emmena Ă lâempereur, accompagnĂ©s des meilleurs traducteurs.
Les portes de la CitĂ© ImpĂ©riale sâouvrirent, ils passĂšrent la cour et le rencontrĂšrent enfin
Tito demanda :
- Comment se nomme ton royaume ?
Lâempereur lui rĂ©pondit :
- *Voix : Le Mandat du Ciel mâa donnĂ© Ă gouverner ces provinces riches et fertiles rĂ©unies sous un mĂȘme et vaste empire que lâon dĂ©signe par Empire du Milieu.
Mais cela paressait absurde Ă Tito puisque toutes les cartes montraient pourtant que lâEurope Ă©tait au centre du monde. Lâempereur nâen dĂ©mentit pas et lui assura que câĂ©tait son empire, tout aussi Ă©tendu, qui Ă©tait au centre. Il finirent par sâaccorder sur le fait que la Terre Ă©tait Elle bien au centre de lâUnivers et que le Soleil tournait autour de leur contrĂ©e exactement de la mĂȘme façon.
Avant de partir, lâempereur proposa un marchĂ© : de sâĂ©changer leur bien les plus prĂ©cieux.
Tito fit apporter le sac rempli des joyaux de lâEldorado et le tendit Ă lâempereur. Lui sortit de sa tunique un papier sur lequel Ă©tait Ă©crit des symboles inconnus bien que familiers.
Tous pensÚrent à un code pour trouver un trésor enfoui, mais Allegro comprit que le trésor était déjà sur son violon.
Il déchiffra et joua ainsi :
Lâempereur sourit et prit son instrument : - *Musique
Et on remercia mille fois lâempereur.
INDE
Leur pĂ©riple les amenant toujours plus loin, ils longĂšrent la cĂŽte jusquâĂ un fleuve, posĂšrent lâencre et dĂ©cidĂšrent de poursuivre prudemment dans une embarcation.
Les paysages Ă©taient incroyablement diffĂ©rent de ce quâils avaient vu jusquâĂ prĂ©sent. Ils avaient lâimpression de dĂ©couvrir de nouvelles couleurs.
LâatmosphĂšre Ă©tait trĂšs particuliĂšre. Ils sâarrĂȘtĂšrent bientĂŽt sur la rive.
Le premier habitant quâils rencontrĂšrent Ă©tait un homme assis en tailleur, la barbe longue et de la peinture sur le visage, rĂ©citant un syllabe sacrĂ©e.
On lâinterrompu pour lui demander : - Vieil homme que chantes-tu ?
Il répondit :
- *Voix : Cette syllabe dĂ©crit tout lâUnivers.
- Vieil homme, comment se nomme ton pays ?
Il répondit :
- Mon pays est la Terre, mais si vous me demandez ou vous vous trouvez, câest ici la VallĂ©e du Gange. Puisse les 30 millions de divinitĂ©s que je vĂ©nĂšre veiller sur vous.
On fut alors bien surpris dâapprendre quâil adorait autant de dieux mais quâil nâavait quâun seul son pour tous les dĂ©crire, alors quâon savait bien quâil nây avait quâun Dieu unique et quâ«une idĂ©e claire et distincte Ă©tait exprimĂ©e par le langage et la raison».
En regardant les instruments, lâhomme, curieux, demanda aux musiciens dâĂ©couter de leur musique
On joua ainsi :
Lâhomme Ă©couta agrĂ©ablement et leur dit sur un ton assurĂ© que notre musique vibrait en dĂ©calage des frĂ©quences naturelles de huit unitĂ©s.
On raccorda alors les instruments et on le remercia mille fois.
EGYPTE
Ils regagnĂšrent le navire et continuĂšrent toujours plus vers lâOuest. Nos marins sâengouffrĂšrent peu Ă peu dans une mer bordĂ©e de deux continents, oĂč les paysages Ă©taient dĂ©pourvus de toute vĂ©gĂ©tation.
Ils finirent enfin par trouver un port pour accoster.
La ville grouillait, la chaleur, les musiques et les senteurs dâencens les envoutaient.
Il firent la connaissance dâun marchand qui leur proposa de leur montrer ce quâil appelait lui mĂȘme la plus grande Merveille du monde.
Ils partirent donc dans le dĂ©sert Ă dos dâanimal bossu. Le Soleil Ă son zĂ©nith Ă©tait impitoyable.
La voix du marchand rĂ©sonnait dans lâimmensitĂ©.
Le trajet fut Ă©prouvant, mais lorsquâils arrivĂšrent, toutes leur peines furent oubliĂ©s. Ils avaient devant eux la plus impressionnante des construction humaine, trois Pyramides majestueuses pointant vers les Ă©toiles.
*Musique
Et on remercia mille fois le marchand.
Avant de partir, on constata quâune mer familiĂšre Ă©tait Ă seulement quelques lieus de celle oĂč lâembarcation attendait. Tito proposa lâidĂ©e au marchand de creuser un canal qui relierait les deux eaux.
AFRIQUE
Le Passaro mis ensuite cap vers le Sud en longeant lâĂ©norme continent. Ils durent bientĂŽt faire escale.
Les terres Ă©taient terriblement sĂšches mais les animaux extraordinaires, les plus imposants quâils nâavaient jamais vu. Certains faisait 18 pieds de haut, avec un long cou et des taches, dâautres avec un long nez dĂ©fendu par deux grandes cornes, et des bĂȘtes au pelage abondant autour de la tĂȘte, aux crocs et griffes acĂ©rĂ©es. Au loin, on apercevait un magnifique volcan enneigĂ©.
La nuit tombait vite ici et il ne faisait pas bon de rester ainsi dans les parages. Ils furent accueillis par les habitants qui les invitĂšrent Ă les rejoindre.
Autour du feu, chacun contait ses aventures.
Le Morani, brave guerrier racontait en montrant chacune de ses cicatrices : - *Voix : Ici, il leur fallait tuer le lion pour devenir des hommes.
AprĂšs cela les percussions retentirent et tous se mirent Ă danser.
La semaine suivante, ils dirent au revoir Ă leurs nouveaux amis et continuĂšrent Ă suivre les cĂŽtes. Les femmes chantĂšrent pour eux
RETOUR
Ils passÚrent le point le plus méridional avant de remonter vers le Nord. Il sentirent que ce cap là les mÚnerait bientÎt chez eux, et le nommÚrent Cap de Bonne Espérance.
Ils constatĂšrent Ă©galement lors de leur remontĂ© que la forme du continent Ă©tait semblable au premier oĂč ils avaient posĂ© le pied de lâautre cĂŽtĂ© du Grand OcĂ©an. Ils en dĂ©duisirent que ce dernier se trouvait Ă lâOuest, ce qui semblait alors impossible puisquâon venait de lâEst.
Mais quelques semaines plus tard, les paysages chaleureux, les senteurs subtiles, les oiseaux Ă©lĂ©gants et lĂ©gers, les barques de pĂȘcheurs voguant doucement, tout leur rappelait leur terre natale : et dans cette baie accueillante quâils connaissaient si bien, ils aperçurent le Port des Dames dâoĂč ils Ă©taient partis trois annĂ©es plus tĂŽt.
*Musique
Ils avaient fait le tour du Monde.
Histoire et références
Présentation
Lâhistoire se situe Ă lâĂ©poque Ă©pique des Grandes DĂ©couvertes et des explorations maritimes qui suivirent, entre le XVĂšme et le XVIIIĂšme siĂšcle. Les rĂ©fĂ©rences, tant historiques que philosophiques couvrent toute cette pĂ©riode. Ce conte musical pourrait en effet sâapparenter Ă un conte philosophique Ă la maniĂšre du Candide de Voltaire.
Les thĂ©matiques de la relativitĂ© culturelle, de lâĂ©tat de nature, de lâethnocentrisme, de la diversitĂ© des religions y sont abordĂ©es, mais au final, de lâunitĂ© autour de la musique comme langage universel.
Références
Intro
« Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas » attribuée au légendaire Lao-Tseu
LâĂ©quipage de dĂ©part est avant tout EuropĂ©en dans son ensemble : on part du Port de Dames, quelque part sur une cĂŽte française, les marins qui chantent sont irlandais, le Passaro est une caravelle portugaise â dâoĂč son nom dans cette langue « lâOiseau » - pour rendre hommage bien-sĂ»r Ă la premiĂšre expĂ©dition de circumnavigation de Magellan entre 1519 et 1522, mais le capitaine, Tito, lui, est espagnol, tandis que son acolyte violoniste Allegro, bien entendu, italien (on pourrait dire gĂ©nois mĂȘme).
« Sur le port des dames, les marins chantaient et les rĂȘves les hantaient dĂ©jà » qui nâa pas reconnu ici la reprise de la fameuse chanson de Jacques Brel, grand voyageur lui aussi
Le Passaro fait cent pieds de long, câest-Ă -dire dans les trente mĂštres, taille des navires dâexpĂ©ditions comme la Santa Maria ou la Victoria.
Le systĂšme mĂ©trique nâa Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ© quâĂ la fin du XVIIIĂšme puis plus largement adoptĂ© au siĂšcle suivant, et avant câest bien en pieds que lâon compte.
Le Grand OcĂ©an (nom fictif) correspond bien entendu Ă lâOcĂ©an Atlantique, aussi appelĂ© au cours de lâHistoire mer OcĂ©ane, limite du Monde connu dâalors, bien que les Vikings lâavaient dĂ©jĂ traversĂ© cinq siĂšcles plus tĂŽt par la voie du Nord. Source de bien des lĂ©gendes et des mystĂšres, on le nommait mĂȘme au-delĂ du Cabo do Medo â Cap de la Peur (actuellement Cap Boujdour) - la mer des TĂ©nĂšbres, dont trop dâembarcations ne revenaient pas et quâaucun marin ne voulait traverser.
Amérique
Il est dit que Tito est un grand astronome. Ce nâest pas anecdotique : en effet, les marins de lâĂ©poque, et surtout les capitaines, devaient avoir des grandes connaissances en astronomie pour pouvoir se repĂ©rer en pleine mer grĂące aux Ă©toiles. Câest dâailleurs grĂące Ă ses connaissances que Christophe Colomb ayant dĂ©barquĂ© sur le Nouveau Monde avait pu prĂ©dire lâĂ©clipse lunaire du 1er mars 1504 lui donnant alors le respect et lâadmiration des tribus locales.
Dans cette partie, nul besoin dâexpliquer ici le pouvoir de la musique qui transcende le langage et les cultures. En faisant le parallĂšle avec la grammaire universelle de Chomsky, il pourrait en effet y avoir Ă©galement une musique universelle qui rĂ©side dans les structures mĂȘmes de notre corps (cordes vocales plus prĂ©cisĂ©ment) et de notre psychisme : la grande majoritĂ© des peuples, et de maniĂšre gĂ©nĂ©rale tout un chacun quand il chantonne, compose spontanĂ©ment selon la gamme pentatonique qui est donc commune, comprĂ©hensible, mĂ©lodieuse, on pourrait « qui sonne bien » intuitivement pour tous.
Pour les plus curieux sur le sujet, vous pouvez consultez dans les liens utiles la démonstration, simple et géniale, du chanteur Bobby McFerrin avec le public.
Enfin lâallusion au mythique Eldorado - rĂ©interprĂ©tĂ© pour ce conte - qui a fait rĂȘver tant dâhommes de lâĂ©poque de tous milieux, hidalgos et fidalgos, gentilshommes, conquistadors, mais aussi roturiers, marins et explorateurs, tous en quĂȘte dâaventures, dâor et de richesses.
Polynésie
Le nom de lâOcĂ©an Pacifique vient de lâexpĂ©dition de Magellan qui le nomma bien dâaprĂšs son aspect calme, beaucoup trop calme mĂȘme par endroit si bien que le vent pouvait ĂȘtre totalement absent pendant plusieurs jours. Le bateau nâavançant plus, les marins finirent avec la peau brĂ»lĂ©e par le Soleil, les vivres devinrent rares, et toute lâentreprise fut alors menacĂ©e par la faim et lâaccablement, flĂ©aux tout aussi ravageurs que les tempĂȘtes et les mutineries.
Câest donc Ă point nommĂ© quâils arrivĂšrent en PolynĂ©sie.
« Les habitants Ă©taient tous nus de la tĂȘte au pied, mais semblaient ignorer quâils lâĂ©taient » est une allusion directe au Paradis originel, au jardin dâEden, mais qui trouve son Ă©chos rĂ©el dans les rĂ©cits du Voyage autour du Monde de Bougainville lorsquâil arriva dans ces contrĂ©es en 1767. Câest par ces lectures entre autres, que Rousseau puisa son idĂ©e dâĂ©tat de nature harmonieux â qui avait cependant dĂ©jĂ fait du chemin avec le mythe du bon sauvage dĂ©veloppĂ© par des auteurs avant lui comme Montaigne qui sâinspira de son cĂŽtĂ© des rĂ©cits des premiers explorateurs rencontrant les « indiens » du Nouveau Monde (comme les Caribes et les Amazoniens) - et dont toute la citation suivante « mais il se rendirent compte quâon avait transportĂ© Ă lâĂ©tat de nature des idĂ©es prises dans la sociĂ©tĂ© » lui rend hommage.
« Ils se contentaient de cueillir le jour et de chanter la vie » est une traduction de Carpe Diem.
Toute la thĂ©matique abordĂ©e ici sur la propriĂ©tĂ© et lâabondance, ainsi que la musique, font Ă©galement rĂ©fĂ©rence au film The Thin Red Line de Terence Malik et de sa superbe B.O. signĂ©e Hans Zimmer.
Le nom Iwi WaĂŻ signifie « Peuple de lâEau » en langue polynĂ©sienne . La vingtaine de façon de dĂ©signer lâeau fait directement allusion au nombre de mots pour dĂ©signer la neige chez les Inuits.
Chine
Le passage en mer dĂ©bute avec La Baie des GĂ©ants. Lâimmense navire puis la gigantesque flotte que les marins rencontrent, câest celle de lâamiral chinois Zheng He au dĂ©but du XVĂšme siĂšcle. MalgrĂ© tous les superlatifs, les expĂ©ditions chinoises restĂšrent cependant assez locales dans lâocĂ©an Indien, allant tous au plus jusquâaux cĂŽtes de lâAfrique. Mais les alĂ©as historiques firent quâau final la Chine ne sâaventura guĂšre plus dans la dĂ©couverte des ocĂ©ans et de ce qui se passe au delĂ , elle qui Ă©tait dĂ©jĂ trop occupĂ©e avec ce qui se passait Ă lâintĂ©rieur sur son immense territoire.
Lâempereur pourrait donc ĂȘtre ici le cĂ©lĂšbre Yongle de la puissante dynastie Ming, fondateur de la CitĂ© Interdite Ă lâintĂ©rieur mĂȘme de la CitĂ© ImpĂ©riale, et contemporain du portugais Henri le Navigateur, premier prince europĂ©en Ă avoir vĂ©ritablement lancĂ© les grandes dĂ©couvertes ; ou bien Jiajing, toujours des Ming, mais un siĂšcle plus tard, et qui aimait visiter son empire avec sa flotte.
Toute la discussion qui sâen suit est une allusion directe Ă lâethnocentrisme de ce temps, le sinogramme pour dĂ©signer la Chine se lisant bien comme « Empire du Milieu ». Mais si aucun pays nâest au centre, la Terre est bien quant Ă Elle au centre de lâUnivers : nous sommes ici dans la pĂ©riode avant la « dĂ©couverte » de lâhĂ©liocentrisme par Copernic (1543) puis GalilĂ©e (1610), « dĂ©couverte » car si câest le gĂ©ocentrisme dâAristote relayĂ© par PtolĂ©mĂ©e qui a gagnĂ© la bataille des idĂ©es jusquâau XVIIĂšme - XVIIIĂšme siĂšcles, certains de leur contemporains de lâantiquitĂ© prĂŽnaient
dĂ©jĂ Ă lâĂ©poque la version hĂ©liocentrique pour expliquer la position de la Terre, du Soleil et des planĂštes ainsi que la course des astres dans le ciel.
Mais encore une fois, la musique met tout le monde dâaccord.
Inde
Le personnage que les aventuriers rencontrent est un Yogi rĂ©citant le son Aum, qui Ă lui seul doit dĂ©crire tout lâUnivers : câest la trimurti sacrĂ©e de lâhindouisme, le A de la crĂ©ation, Brahma, le U de la conservation, Vishnou, et le M de la destruction, Shiva. Ces trois divinitĂ©s primordiales se subdivisent ensuite en une myriade dâautres, dâoĂč son nom de religion aux 30 millions de divinitĂ©s. Cependant, malgrĂ© toute cette diversitĂ©, lâhindouisme admet bien un principe premier au dessus de tout cela nommĂ© Brahman.
Il y a ici une opposition, seulement apparente donc, entre le monothĂ©isme europĂ©en, fondĂ© sur le langage (logos) et la raison - avec ici la citation de Descartes - et le polythĂ©isme (mais comme on vient de le dire qui admet le principe premier) intuitif oriental. Nombre dâauteurs ont dâailleurs rapprochĂ© ce AUM au Verbe crĂ©ateur de la Bible.
AprĂšs avoir jouĂ© jusquâici des musiques locales, il est temps de faire entendre un peu de musique « europĂ©enne » en esquissant les « codes » de lâĂ©poque : le contrepoint, entre flĂ»te et violon qui se rĂ©pondent, et les trois notes de fin, pour ceux qui lâauraient reconnu, signature de Mozart Ă la fin de ses morceaux.
La remarque sur le dĂ©calage de huit unitĂ©s : toute notre musique aujourdâhui vient dâune convention dâaccordage de la note LA en 440Hz et des harmoniques qui en dĂ©coulent. Cependant on a dĂ©couvert que la matiĂšre â celle qui nous entoure et qui nous compose â vibre elle selon des harmoniques naturelles proches du LA 432Hz. Ecouter une telle musique accordĂ©e sur cette frĂ©quence rĂ©sonnerait donc bien plus intuitivement en nous. Lâensemble de la musique du rĂ©cit est cependant en 440Hz pour ne pas sembler « dissonante » Ă notre oreille habituĂ©e Ă cette frĂ©quence, mais plein de logiciels et applications existent pour ceux qui veulent lâĂ©couter en 432Hz !
Egypte
Ou plutĂŽt Orient, celui qui a fait fantasmĂ© toute une gĂ©nĂ©ration dâaventuriers.
En plus des Ă©vocations musicales, lâaccent a Ă©tĂ© mis ici, aprĂšs les couleurs de lâInde, sur les autres sens, les odeurs, la chaleur, lâambiance gĂ©nĂ©rale. Ce pourrait ĂȘtre le Caire, bien que la musique dans la ville soit plutĂŽt turque et le duduk dans le dĂ©sert, armĂ©nien.
Le caravanier qui emmĂšne les aventuriers dans le dĂ©sert pour leur monter les grandes pyramides chante le Adhan ; tout comme le Aum prĂ©cĂ©dent ou dâautres chants religieux de toute confession, chacun, croyant, athĂ©e ou juste mĂ©lomane, pourra apprĂ©cier la mĂ©lodie et la musicalitĂ© de ces odes.
Enfin, la petite référence historique à la fin du passage fait bien entendu écho au canal de Suez percé dans les années 1860.
Kenya
Vous lâaurez devinĂ©, les marins arrivent enfin au Kenya dâoĂč ils aperçoivent le majestueux Kilimanjaro. Comme cela est racontĂ©, les guerriers MaasaĂŻs appelĂ©s Morani avaient comme rite de passage ancestral la mission dâaffronter et de tuer le lion pour devenir des hommes et pouvoir assurer la protection de leur groupe.
Le chant des femmes vient dâun magnifique enregistrement trouvĂ© sur internet.
Retour
Quelques derniĂšres rĂ©fĂ©rences historiques : pour le cap de Bonne-EspĂ©rance, le nom historique vient Ă©galement dâun retour aprĂšs un long voyage, mais pas tout Ă fait comme dans ce conte : alors que Bartolomeu Dias chargĂ© de lâexpĂ©dition vers les Indes le nomma cap des TempĂȘtes car il fut contraint de faire demi tour aprĂšs lâavoir franchit en 1488, le roi Jean II du Portugal le rebaptisa ainsi car il perçut au contraire une promesse, une ouverture prochaine sur cette prĂ©cieuse route franchissant lâAfrique et menant aux richesses et merveilles de lâInde. Vasco de Gama y parvint dix annĂ©es plus tard.
La forme des continents et leur correspondance, assez Ă©vidente lorsque lâon a une carte moderne sous les yeux, ont Ă©tĂ© constatĂ©es par les explorateurs puis justement les cartographes de ce temps qui avaient la tĂąche tout Ă fait fastidieuse de devoir correctement reprĂ©senter la Terre (rien que ça!) dâaprĂšs les diverses mesures et rĂ©cits de leurs acolytes sur Mer.
Câest aussi ce qui inspirera la thĂ©orie de la dĂ©rive des continents au dĂ©but du XIXĂšme siĂšcle.
Enfin, comme on sâen doutait bien Ă lâĂ©poque, on revient au point de dĂ©part en avançant toujours tout droit. Câest confirmĂ©, la Terre est ronde !
Reprise du thÚme du Passaro avec les instruments des mille contrées, des souvenirs pleins le coeur, quelle aventure !
Contexte
Bonjour à toi qui vient découvrir ce compte musical à travers les continents !
Laisse-moi tâexpliquer briĂšvement le contexte gĂ©nĂ©ral, dâoĂč je viens, dâoĂč vient lâidĂ©e de ce rĂ©cit, les influences, lâhistoire et les nombreuses rĂ©fĂ©rences dont je suis sĂ»r tu en aura reconnu quelques- unes
Un peu sur mon expĂ©rience, je la fais courte ! Pianiste (amateur) jâai commencĂ© trĂšs jeune avec une formation en conservatoire en musique classique, mais jâai ensuite abordĂ© diffĂ©rents styles et me suis mis Ă composer sĂ©rieusement depuis de nombreuses annĂ©es maintenant.
Mon autre passion câest le voyage ! Je suis allĂ© un peu partout en Europe, Ă HawaĂŻ et ses plages paradisiaques, au BrĂ©sil et son Amazonie puissante et luxuriante, au Maroc et ses dĂ©serts, aux Canaries et ses Volcans, et bien dâautres.
AprĂšs 4 mois de road trip en AmĂ©rique Centrale et de retour en France, jâai dĂ©cidĂ© dâintĂ©grer la formation de la Music Academy International de Nancy en musique Ă lâimage pour vraiment approfondir tous les aspects de la composition musicale, tout particuliĂšrement pour les films.
En effet, comment bien raconter une histoire sans y mettre cette touche musicale qui donne tant de puissance aux images ? Quâest-ce quâun film sans sa bande son qui lui est liĂ©e ? Les B.O. sont dĂ©sormais Ă juste titre des incontournables de la musique classique et les plus grands compositeurs dâaujourdâhui, comme John Williams, Ennio Morricone, et lâimmense Hans Zimmer qui a Ă©tĂ© une grande inspiration pour ce conte, composent pour des films. On a tous nos B.O. cultes favorites qui sont de vĂ©ritables Ćuvres devenues indĂ©pendantes de leur film dâorigine, passant en concert et remplissant les salles de plus nombreux siĂšges que les cinĂ©mas !
Le projet de fin dâannĂ©e de cette super formation consistait en la rĂ©daction dâun livre audio et la composition de sa musique associĂ©e. Parmi les nombreux thĂšmes proposĂ©s, le voyage Ă©tait lâun deux : le choix Ă©tait donc Ă©vident pour moi.
VoilĂ pour une brĂšve explication du contexte de ce projet qui lie mes deux passions : les influences musicales, diverses et variĂ©es, avec beaucoup de musiques du monde que jâaffectionne particuliĂšrement et qui rĂ©sonnent avec mes diffĂ©rents voyages, et un maĂźtre en la matiĂšre, Hans Zimmer, qui a su magnifiĂ© dans de nombreux films - Le Roi Lion, La Ligne Rouge, Kung-fu Panda, etc â les musiques des quatre coins du globe.
Ici, vous aurez lâoccasion dâĂ©couter de vĂ©ritables et magnifiques chants locaux, celui des peuplades de la forĂȘt dense dâAmĂ©rique Centrale, des MĂ©lanĂ©siens ou encore des MaasaĂŻs issus de fonds dâethnomusicologie (Fond Brailoiu, archives du CREM)...
Bonne Ă©coute, et surtout, bon voyage !
Liens utiles
Jacques Brel, Sur le port dâAmsterdam : https://www.youtube.com/watch?v=vsra2Rj06hw
Chant du cacique d'Amérique : Fond Brailoiu http://www.ville-ge.ch/meg/musinfo_ph.php
DĂ©monstration de Bobby McFerrin sur la gamme pentatonique : https://www.youtube.com/watch? v=ne6tB2KiZuk
Hans Zimmer & Melanesian choir, The Thin Red Line soundtrack
God yu tekem laef blong mi : https://www.youtube.com/watch?v=ReWoLyeuZPw
Jisas yu holem hand blong mi : https://www.youtube.com/watch?v=9DsHVe6fkzY
et lâextrait du film correspondant : https://www.youtube.com/watch?v=VVD0I6O0UJk
Chants mélanésiens : Archives du CREM https://archives.crem- cnrs.fr/archives/items/CNRSMH_I_1970_034_001_01/
Pour le contrepoint, de nombreuses piĂšces de J.S. Bach dont le fameux Art de la Fugue
Pour la signature musicale de Mozart, beaucoup de ses morceaux la contiennent Ă la fin
Odes et chants religieux de toutes confessions : voire à„, Ű§Ù Ű°ÙŰŁÙ , chants juifs et chrĂ©tiens entre autres
Sites pour convertir une musique en 432Hz (vĂ©rifier si toujours dâactualitĂ©!) :
https://www.432hzconverter.com/ https://audioalter.com/preset/432hz
Et toute lâaventure sur mon Soundcloud, page artiste Octave Shk, album La Grande EpopĂ©e :